Danseuse depuis mes 4 ans, d'abord en classique à l'école de Mme Sebille puis au Conservatoire de Montreuil, en danses latines et tropicales à l'école d'Isis Figaro puis en flamenco auprès de José Maya puis de Rafael et Adela Campallo et de Nazaret Reyes et Juana Amaya, je me suis rendue compte que les personnes qui ressentent des douleurs, qui ont des limitations, des problèmes de coordination restaient souvent sur le côté et étaient la risée des autres élèves mais surtout des professeurs et cela ne m'a jamais semblé juste car la danse est bien autre chose qu'une question de technique.
Par ailleurs, il y avait une certaine limitation dans l'expression du corps, qui devait se limiter à une certaine façon de faire qui, selon moi, empêchait d'explorer d'autres voies, d'improviser davantage.
Pendant mon parcours très intensif en flamenco, lors de ma longue période à Séville, j'ai développé une fragilité très douloureuse au tibia et alors que j'en informais mon professeur de l'époque, celui-ci a secoué la tête en me disant qu'il était désolé. Traduction : "la danse c'est fini pour toi."
Puis, en studio, je me voyais faire essentiellement des frappes de pieds et le langage corporel, très riche par ailleurs du flamenco, me semblait être secondaire. Je dansais "comme un homme" sans utiliser les hanches, sans utiliser ma rondeur, ma douceur, laissant quelque part ma sensualité, ma féminité de côté.
C'est là que je me suis tournée vers la danse orientale auprès de différentes professeures et vers le Bollywood avec Hemant Devara et Gali Arzoo pour renouer avec cette partie de moi que je ne pouvais pas exprimer à mon goût en flamenco.
C'est là que j'ai commencé à entrevoir des manières plus douces de danser, des gestes plus respectueux de mon corps.
Puis un peu plus tard, mon épaule a remontré des signes de faiblesse après plusieurs années de répit, me lâchant en pleine répétition.
J'ai donc décidé de trouver des chemins de traverses, plus respectueux de mon corps pour pouvoir continuer à danser car il était clair que les voies traditionnelles n'étaient plus pour moi.
Des chemins qui me permettraient aussi d'aider les personnes souhaitant danser en préservant leur corps et celles pour qui les cours traditionnels sont difficiles d'accès dû à la performance qui y est attendue et à la compétitivité qui peut y régner.
De là, j'ai commencé à explorer le flamenco pieds nus, à le danser sur d'autres musiques (du jazz principalement grâce à de fantastiques musiciens dont j'ai croisé la route, dont le pianiste Vijay Iyer qui a été une rencontre très inspirante dans les débuts en 2016 et nos différents échanges ont permis une compréhension un peu plus ample de cette aspect fusion) à explorer plus avant le bollywood, le kalbélia et le kathak (danses indiennes), la danse orientale et à mettre tous ces mondes ensemble.
Ma pratique du yoga depuis 2012 m'a également amenée à constater des similitudes entre certaines postures et certains mouvements en flamenco.
C'est aussi en laissant mon corps trouver son chemin au milieu de ces influences que j'ai pu voir apparaître des émotions, des mémoires.
Puis, lorsque j'habitais à Palerme, j'ai découvert le Tai Chi et ce fût une véritable révélation.
Cette nouvelle manière, plus fluide, plus subtile, plus souple d'appréhender le mouvement a changé ma façon de danser et m'a même permis de dépasser certaines limites.
C'est à ce moment là que j'ai pu commencer à enseigner, toujours à Palerme, cette nouvelle approche du flamenco.
Mon retour en France dû au COVID m'a donné l'occasion de découvrir le Feldenkrais, qui m'a permis d'aller plus loin dans le ressenti plus précis et subtil des mécanismes de mon corps pendant le mouvement et d'approfondir ce que j'avais appris en Tai Chi.
Enfin, mon parcours personnel thérapeutique en ostéopathie et en kinésithérapie m'a permis de voir, percevoir les choses autrement, de façon à la fois plus mécanique et plus "organique" et d'expérimenter de nouvelles sensations dans mon corps que j'ai travaillé à retraduire dans ma danse par la suite. Et j'y travaille encore.
Formée en tant que professeur de yin yoga en 2021 auprès de Gemma Vassallo et Bernie Clark, cela m'a également permis d'avoir une connaissance plus précise des fascias, qui sont également engagés lorsque l'on danse et l'intégration du concept de tenségrité m'a également permis de percevoir le déroulé du mouvement dansé de manière plus globale.
Aux termes d'échanges avec mon ostéopathe, j'ai pu affiner encore davantage mon approche de ce flamenco transformé, entre autre pour pouvoir le rendre accessible aux personnes souffrant de limitations articulaires, de douleurs type fibromyalgie, et en 2022 j'ai pu commencer à l'enseigner à Montreuil.
Au fur et à mesure des cours, j'ai pu constater que le Flamenkrais (ou Flam'en corps ®) avait également des effets bénéfiques sur les douleurs de l'endométriose de part le travail de respiration pendant la danse, les mouvements en conscience et les exercices d'isolation.
Le Flam'en corps ® ("Flamenkrais") est donc né au terme d'un parcours de plusieurs années de recherches, d'expérimentations, et il s'enrichit encore de mes apprentissages, inspirations et de ce que j'apprends en cours de mes élèves.
C'est une approche en perpétuelle évolution. En perpétuel mouvement.